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RDC : Pourquoi le monde ferme-t-il les yeux sur les exactions de Kigali ?

RDC : Pourquoi le monde ferme-t-il les yeux sur les exactions de Kigali ?

Depuis trois décennies, l’est de la République démocratique du Congo (RDC) est en proie à des conflits meurtriers alimentés par des enjeux économiques, des revendications territoriales et l’ingérence de puissances extérieures. Des millions de civils ont été contraints à l’exil, fuyant des violences qui semblent sans fin. Le retour du groupe rebelle M23 en 2021, et plus récemment son entrée à Goma le 26 janvier 2024 avec le soutien du Rwanda, marque une nouvelle escalade dans cette crise. Malgré des preuves accablantes de l’implication de Kigali, la communauté internationale tarde à réagir de manière significative.

L’avancée du M23 ne peut être comprise sans examiner le rôle déterminant du Rwanda. Après avoir considéré que ses intérêts étaient menacés dans l’est congolais, Kigali a intensifié son appui aux rebelles, leur fournissant des moyens militaires sophistiqués et un soutien logistique. Un récent rapport des Nations unies estime que 3 000 à 4 000 soldats rwandais opèrent directement en RDC aux côtés du M23. Cette assistance a permis aux rebelles d’acquérir une supériorité militaire sur les Forces armées congolaises (FARDC) et la Mission de l’ONU pour la stabilisation en RDC (Monusco). Depuis la reprise des hostilités, plus de deux millions de Congolais ont été déplacés, victimes des exactions du M23.

Le Rwanda perçoit l’est congolais à la fois comme une menace et comme une opportunité. D’une part, Kigali justifie son ingérence par la nécessité de sécuriser ses frontières face à la présence de groupes armés congolais hostiles. D’autre part, l’exploitation illégale des ressources naturelles congolaises représente un enjeu économique majeur. Depuis 2016, l’or est devenu le principal produit d’exportation du Rwanda, alors même que le pays ne possède pratiquement pas de gisements aurifères. Le coltan, essentiel à l’industrie technologique, suit le même circuit. Le rapport onusien évoque ainsi l’acheminement de 120 tonnes de coltan par mois du Congo vers le Rwanda sous le contrôle du M23.

Face à ces éléments, la réaction internationale reste limitée. Certes, l’Union européenne et les États-Unis ont condamné l’action du M23 et la présence du Rwanda en RDC. En 2023, quelques sanctions ont été imposées à un officier militaire rwandais, mais elles restent largement symboliques. Contrairement à la crise de 2012-2013, où plusieurs pays avaient suspendu leur aide au développement à destination du Rwanda, aucune mesure économique forte n’a été adoptée cette fois-ci.

La prise partielle de Goma par le M23 pourrait-elle marquer un point de bascule ? Jusqu’ici, le groupe rebelle évitait une occupation trop visible pour ne pas susciter une réaction internationale plus ferme. Pourtant, des révélations récentes indiquent que des troupes rwandaises ont franchi la frontière pour appuyer directement l’offensive sur Goma. Cette escalade met la communauté internationale face à ses contradictions : continuera-t-elle à détourner le regard, ou prendra-t-elle enfin des mesures concrètes pour freiner l’expansion du M23 et l’ingérence rwandaise en RDC ?

Amen K.

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